So Youn naquit à Séoul au début du mois de mars de deux parents purement coréens. Ils avaient voulu cet enfant et cela faisait plus de deux ans qu'ils essayaient d'en avoir un. Younie débarqua donc dans leur vie et ils prirent beaucoup soin de lui. Sa maman, fan de mode, trouvait toujours les derniers vêtements sortis pour qu'il soit bien habillé (déjà tout bébé) et son père s'amusait avec lui à le déguiser en pirate, en footballer, en dragon... Son enfance fut tout à fait normale si l'on peut dire cela ainsi.
Il rentra ensuite à l'école et faisait de son mieux pour bien travailler afin que ses parents fussent fiers de lui. Il avait beaucoup de copains, car il allait parler à tout le monde et souriait tout le temps. La seule petite chose que tous ses instituteurs lui reprochèrent, ce fut son bavardage quasi-incessant. Outre cela, So Youn était un petit garçon très épanoui, qui croquait la vie à pleines dents, toujours prêt à s'amuser quelle que fût la situation dans laquelle il pouvait être.
Tout allait donc parfaitement bien, jusqu'à son arrivée au collège où là, les caractères changèrent radicalement. En effet, les moqueries sur son physique plutôt féminin débutèrent et Younie dut les supporter de longues années. On l'embêtait pour un rien, le frappait parfois ou l'insultait, mais le jeune homme continuait de sourire pour ne pas montrer que tout cela lui faisait du mal. Il avait beau être naïf, il comprenait tout de même quand on s'en prenait à lui.
Les résultats de Younie commençaient toutefois à être de moins en moins bons, car il n'arrivait plus à suivre, il avait réellement peur chaque matin de se rendre à l'école. Il se demandait toujours ce qu'on allait lui faire vivre comme calvaire, mais il n'en parlait à personne, il gardait tout pour lui, subissant tout ce qu'on lui faisait. Il avait beaucoup pleuré durant cette période relativement difficile pour lui, il ne saisissait pas la raison pour laquelle on s'en prenait autant à lui. A croire qu'être trop joyeux pouvait agacer le monde autour de lui ; n'était-ce donc pas que de la jalousie, au fond ?
Il s'accrochait tout de même et parvint à obtenir des notes convenables qui lui permirent de ne redoubler aucune classe. Il avait envie de réussir et de quitter cet établissement de tortionnaires. Il le détestait et petit à petit, Younie perdait de la confiance en soi. Il se remettait énormément en question sur tout, essayant difficilement de changer la personne qu'il était, mais ce fut toujours en vain. Il n'y arrivait pas, parce qu'il était comme il était, tout simplement.
Ce fut uniquement lors de sa dernière année que le garçon craqua complètement. On l'avait insulté gratuitement une énième fois, mais il ne le supporta pas et partit se réfugier dans les toilettes. L'histoire aurait très bien pu se terminer là, mais ses petits camarades à l'esprit très peu développé, vinrent le chercher et le tirer de là. Ils étaient à trois contre lui, mais tout ce qu'avait emmagasiné Younie depuis de trop longues années était plus fort et il cogna. Aveuglément il cogna sur les personnes qui se présentaient à lui, les yeux brouillés de larmes et ses mains innocentes lui disaient de continuer. Il était au bout du rouleau comme on dit, mais il sût s'arrêter. Evidemment, ça fit rapidement le tour de l'établissement et le directeur convoqua les parents du garçon qui ignoraient parfaitement ce qui avait pu pousser leur fils à frapper ses camarades. Ils le punirent sévèrement en l'envoyant à Jigoku no koukou, soi-disant pour lui remettre les idées en place.
L'adolescent avait énormément de honte par rapport à son geste, mais en même temps il se sentait soulagé et le changement d'établissement ne le dérangeait finalement pas plus que cela. Il recommencerait tout ailleurs et son sourire revint sur son visage angélique, ses yeux rieurs reprirent de leurs éclats, son envie de câlins se développa, mais surtout, il avait envie de discuter avec tout le monde. Il se fichait du reste et avait fait un trait dessus.
Mais ce qui demeurait dans tout ça, c'était sa naïveté, son incroyable naïveté. C'était comme s'il voyait le monde différemment de ce que tous les autres voyaient, mais pouvait réellement lui en vouloir ? Car c'était ainsi qu'il reprenait progressivement confiance en lui.